"Il n' y a qu'une seule supériorité: celle du coeur !"

L.V. Beethoven

C'est au début des années 60 que commencèrent nos recherches et nos prudents essais d'utiliser le cinéma et encore davantage la photo, pour tenter de mieux résoudre certaines difficultés psychologiques des adolescents. Il s'agissait essentiellement des manifestations d'anxiété liées aux perturbations de leur image corporelle et réunies sous le terme de dysmorphophobie. L'extrême difficulté à apaiser complètement et durablement ces anxiétés a conduit J. Finder à mettre au point une technique photographique spécifique, que nous avons baptisé le « photodrame ». " s'agit d'une séance, généralement unique dans la vie de l'adolescent, au cours de laquelle le thérapeute prend de l00 à 200 photos tout en poursuivant un entretien psychothérapique très vivant centré sur son corps. La prise de photos, leur développement, leur tirage et leurs agrandissements sont toujours effectués par le thérapeute au foyer et jamais en laboratoire extérieur. La lecture des tirages avec le garçon, le dialogue serré qui s'instaure alors à leur sujet, l'affichage de certains d'entre eux dans l'institution avec la publicité socio-éducative qui l'entoure constituent la dernière étape du photodrame. Celui-ci reste bien entendu intimement lié à la psychothérapie offerte à l'adolescent - le psychothérapeute est aussi le « photothérapeute » - mais s'inscrit aussi dans le registre de la sociothérapie par la diffusion et la mise en valeur publique de certains clichés faite avec l'accord du jeune ...


Les traces de l'image photographique et de l'image télévisée sont profondément différentes. Celle-ci est éphémère et peut être restituée à l'infini ; celle-là est permanente. Le silence de l'une et la parole de l'autre nous semblent néanmoins des critères moins prégnants que l'effet immédiat sur le jeune et le sens qu'il attache à leur conservation. Donner à un adolescent une centaine de photos de lui provoque fréquemment un sentiment de jubilation


Dès que possible, les multiples clichés seront développés et déposés en vrac sur une table. Le jeune découvrira au cours de son entretien thérapeutique ce qui constituera dès lors un nouveau matériel matériel en vue du travail d’élaboration.


Bien évidemment, ce photodrame est sollicité par le jeune et c'est lui qui choisit son photographe. Parfois ce photodrame peut lui être suggéré, à point nommé, par l'éducateur qui entretien avec lui une relation éducative suivie mais toujours sous réserve de son acceptation.

Le photodrame est précédé d'un entretien destiné à définir d'un commun accord, les buts à atteindre, les tenues qui seront utilisées et le style de prises de vues statiques, dynamiques, en mouvement, avec un thème, avec une prépondérance de portraits, de photos en pied, en insistant sur le visage et ses expressions, pour faire ressortir la force, la grâce, le sérieux etc. 


Il est évident qu'au cours de cet entretien, l'éducateur va retenir les desiderata du jeune, mais aussi suggérer des prises de vues, en rapport avec la fixation de l'adolescent.


Le déroulement du photodrame étant établi, le rendez-vous fixé, le local réservé, l'éducateur se met en devoir de préparer le matériel nécessaire : En général, deux boîtiers 24x36 munis de deux focales différentes de deux pieds à fixation rapide, d'un fond neutre, de la quantité nécessaire de pellicule pour réaliser une centaine de photos, y compris une marge de sécurité, en cas de voilage accidentel. L'éclairage est assuré par des flashes électroniques, plus souples que des projecteurs fixes, dont l'installation suppose de multiples manipulations en fonction du type de photo réalisée. Une heure avant, une dernière vérification est effectuée, car il est important que rien ne vienne perturber la séance. Le jeune apporte les tenues qu'il a choisies lors de l'entretien préalable.


Remarque : De nos jours grâce aux techniques du numérique et la souplesse qu'elles offrent, le visionnage peut se faire instantanément et le temps de réaction et de discussion entre le photographe et l’adolescent est plus réduit.

Comme les pages de ce site l’illustrent, la photographie est omniprésente au foyer, chaque événement fait l'objet d'une prise de vue (conseil de maison, expression, sociodrame, réception d'invités, soirée poésie, match sportif, soirée musicale) etc. Pratiquement tous les jeunes et adultes sont photographes ou sujets. Plusieurs appareils reflex, des flashes, des projecteurs, un laboratoire de développement et de tirage sont à la disposition de tous, sous le contrôle du directeur, pour éviter une consommation déraisonnable de pellicule, de papier ou de produits chimiques.


Ce modeste matériel, outre l'intérêt documentaire qu'il présentait et les milliers d'heures d'archives qu'il nous a permis de constituer, a constitué un véritable instrument de cure de la dysmorphophobie.

En effet non seulement chacun pouvait se voir sous des angles inédits, que le miroir ne permet pas, mais également en action, de manière statique ou dynamique, dans de nombreuses activités.

L'auto évaluation, mais aussi le regard des autres à permis à beaucoup de jeunes d'avoir un regard plus objectif sur leur image, de s'accepter et de se réconcilier avec cette image.


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